La dépendance économique de l'AP vis-à-vis d'Israël et le renforcement du système colonial de Tel-Aviv

11:31 - June 07, 2022
Code de l'info: 3480944
Téhéran(IQNA)-Les responsables de l'Autorité palestinienne (AP) ont nié à plusieurs reprises adhérer au modèle de paix économique avec Israël, mais ces dernières années, les liens entre les économies palestinienne et israélienne se sont approfondis.

Anas Iqtait, professeur d'économie politique du Moyen-Orient, à l'Université nationale australienne, a évoqué la situation économique en Palestine, et les politiques économiques de l'Autorité palestinienne dans une note publiée sur le site Internet du Washington Institute for the Moyen-Orient, et déclaré : « Pour l'AP, l'intégration économique avec Israël - à travers la mise en œuvre du cadre d'Oslo - fournit les fonds nécessaires à l'AP et permet de maintenir les activités économiques de base. Les contrats économiques d'Israël avec l'Autorité Palestinienne n'ont fait qu'institutionnaliser et renforcer ces systèmes économiques coloniaux. En mars 2019, l'économiste Mohammad Ashtiah est devenu Premier ministre, avec pour objectif principal de réformer la situation économique et financière en Palestine. Ashtiah a rapidement annoncé un Plan de développement national de l'Autorité palestinienne pour 2021-2023 qui met l'accent sur l'indépendance de l’AP mais en pratique, la réduction de la dépendance économique et financière vis-à-vis d'Israël dépend de la situation politique et par conséquent, de la coopération d’Israël ».

Selon un autre article sur le site Internet de l'Institut du Moyen-Orient, la dépendance économique de l'AP vis-à-vis d'Israël, est basée sur des flux de revenus étrangers ou recyclés - paiements d'aide internationale, envois de fonds des travailleurs palestiniens dans les territoires occupés, et recettes fiscales transférées à l'AP sur une base mensuelle qui détermine la santé financière de l'AP – mais  les changements récents du niveau d'aide à l'Autorité palestinienne et les changements prévus dans la façon dont les travailleurs palestiniens seront payés en Israël, sont susceptibles d'avoir un impact significatif sur l'économie palestinienne dans les années à venir, et de perturber les plans d'indépendance économique de l’AP.

Plus de 41 milliards de dollars d'aides internationales ont été acheminés vers la Cisjordanie et Gaza depuis 1993. Pendant des années, ces subventions ont été l'épine dorsale de l'activité économique, et en l'absence d'autres options budgétaires, ont fourni les revenus indispensables à l'Autorité palestinienne. Jusqu'à récemment, le Trésor de l'Autorité palestinienne était la principale destination de l'aide et environ 40 % des aides à la Palestine depuis 1993, sont allés à l'AP.

Cependant, nous avons constaté ces dernières années, une forte baisse de la volonté des donateurs de financer directement l'Autorité palestinienne. Les contributions de la communauté internationale au budget de l'organisation ont été réduites à 318 millions de dollars en 2021 et ont diminué de 77 % depuis 2013. La quête de revenus de l'Autorité palestinienne l’a conduite à étendre son contrôle économique sur divers secteurs de l'économie palestinienne, une décision susceptible d'accroître la dépendance économique de l'AP vis-à-vis d'Israël.

L'Autorité palestinienne a annoncé un accord avec Israël pour transférer les salaires des travailleurs palestiniens dans les Territoires occupés, aux banques palestiniennes. Contrairement au passé où les salaires étaient payés en espèces ou transférés via des banques israéliennes, en vertu du nouvel accord, les salaires des travailleurs seront versés aux banques palestiniennes par Israël, après déduction de l'impôt sur le revenu et des cotisations de sécurité sociale.

Les transferts attendus sont importants pour la petite économie palestinienne. L'Autorité monétaire palestinienne (PMA) estime que les travailleurs de la Palestine occupée contribuent à environ 5,5 milliards de dollars par an, à l'économie palestinienne.

Compte tenu de la crise financière à laquelle est confrontée l'Autorité palestinienne, le transfert de ces fonds vers des banques palestiniennes, qui nécessite une coopération étroite entre l'Autorité palestinienne et Israël, apportera une solution à court terme, aux problèmes financiers de l'Autorité palestinienne et à ses dépendances fondamentales vis-à-vis des structures économiques.

Pour l'Autorité palestinienne et les banques palestiniennes, à court terme, ces transferts peuvent être une aubaine pour trois raisons. L'Autorité palestinienne espère qu'en transférant ces droits aux banques palestiniennes, les banques israéliennes ne seront plus en mesure d'empêcher les transferts « incontrôlés d'espèces » vers l'économie palestinienne. La deuxième raison est que le transfert des salaires des travailleurs peut rapprocher l'Autorité palestinienne de la collecte d'impôts sur d'importants flux de revenus. Il est vrai que le gouvernement autonome - du moins à ce stade - a assuré aux travailleurs qu'il n'y aura pas de double imposition ou que des coûts supplémentaires ne seront pas déduits de leurs salaires. Mais le bilan récent de l'AP montre que ses efforts pour collecter les impôts intérieurs se multiplient, notamment avec la proposition de réformes fiscales radicales et l’imposition de nouveaux coûts et taxes. Reste à voir si l'AP tiendra ses promesses concernant les droits des travailleurs.

Fin 2017, seuls 25 % des adultes de Cisjordanie et de la Bande de Gaza avaient un compte bancaire. Dans le cadre du nouvel accord, les banques palestiniennes verront une augmentation de leur clientèle et de leurs dépôts. Cette augmentation des dépôts des banques palestiniennes profitera à l'Autorité palestinienne et lui permettra d'augmenter ses limites d'emprunt auprès des banques nationales. En août 2021, les emprunts de l'Autorité palestinienne auprès de ses banques nationales, s'élevaient à 2,5 milliards de dollars, soit 23 % du total des prêts du secteur bancaire.

L'AP est piégée. Maintenir et renforcer l'intégration économique avec Israël fournira des revenus indispensables, mais ne pas fournir une structure économique et financière alternative continuera à renforcer sa dépendance vis-à-vis d'Israël et à affaiblir l'économie nationale palestinienne.

4061251

captcha